16 NOV E-SANTÉ

Quand le digital révolutionne la santé

Vconférences et le Connecting Leaders Club ont réuni le vendredi 13 novembre 2015 plus de 150 personnes pour une nouvelle édition des Matins de l’Economie du JDD consacré à la santé. Les principaux acteurs de la santé ont répondu à nos questions.

Avec près de 170 000 applications concernant la santé, l’émergence de sites de ventes de médicaments en ligne ou de conseils santé, la déferlante des objets connectés et des nouveaux outils tels que la téléconsultation, la révolution de la santé est en marche avec un triple impact médicale, économique et éthique.

1. SERONS-NOUS MIEUX SOIGNÉS ?

Les patients sont de plus en plus informés et acteurs de leur santé.
Ils ont la capacité de collecter eux-même leurs données via leurs smartphones, de contacter un médecin à distance via la téléconsultation et de s’informer sur leurs pathologies par le biais de sites médicaux.

Les objets connectés jouent un rôle fondamental dans la prévention mais aucune évolution technologique ne pourra remplacer le rapport humain entre le médecin et le patient. La révolution technologique va beaucoup plus vite que la démarche universitaire. Il faudra donc repenser la formation des médecins. Les études de médecine et de pharmacie devront évoluer en prenant plus en compte l’évolution du rôle du médecin.

La téléconsultation est un outil permettant de joindre un médecin à n’importe quelle heure quelque soit l’endroit où il se trouve.

Nicolas Moreau, Président-Directeur d’AXA France, précise que ce service permet désormais de transmettre directement les ordonnances aux pharmaciens et les résultats de la consultation au médecin traitant ou aux hôpitaux. La téléconsultation ne se substitue pas aux médecins mais permet de solliciter un second avis lors d’un accident à l’étranger.

Elle peut être un outil qui permettra de réduire les déserts médicaux et l’engorgement des services d’urgences.

Nous allons vers une médecine plus préventive, personnalisée et prédictive qui permettra de développer des parcours de soin plutôt que des consultations ponctuelles.

2. QUELS IMPACTS SUR LE COÛT DE LA SANTÉ ET LE DÉFICIT PUBLIC ?

Selon Christian Nibourel, Président d’Accenture, les dépenses de la santé s’élèvent à 170 milliards d’euros dont 100 milliards sur les pathologies lourdes.

Alors même que l’Etat souhaite investir à nouveau dans le dossier médical partagé, Thierry Zylberberg, Directeur d’Orange Healthcare a développé de nouveaux outils afin de stocker, améliorer la captation, partager des informations entre tous les acteurs qui permettent de fluidifier le système d’information et de développer des parcours de soins.

Samsung a également développé des outils connectés et des solutions permettant d’automatiser les parcours de soins et aider aux partages d’informations dans les hôpitaux.

Alors que l’Etat a investi plus d’1/2 milliards d’euros pour développer le dossier médical personnalisé, seulement 400 000 patients sont aujourd’hui équipés. « La gouvernance en manière de la e-santé n’est pas stable, la gestion du dossier médical partagé en est l’exemple » indique Christian Nibourel.

Lucien Bennatan, Directeur de Pharmacie Référence groupe, regrette que l’Etat ne se soit pas inspiré de l’exemple des pharmaciens : Les 22 000 pharmaciens ont investi sans l’aide financière de l’Etat pour créer le dossier pharmaceutique qui est aujourd’hui un vrai succès.

Tous les intervenants font le même constat : L’Etat n’a pas encore mis en place une stratégie pour diminuer les coûts de la santé. Selon Christian Nibourel, rapporteur du plan santé, le marché de la santé reste fragmenté tant chez les start-ups que chez les grands industriels français.

3. QU’EN EST-IL DE LA FILIÈRE FRANÇAISE DE LA E-SANTÉ ?

Le professeur Arnold Munnich, Directeur de l’hôpital Necker et Prix de la Médecine de Paris, conseille depuis quelques années la banque Oddo. Philipe Oddo, Président de la banque Oddo, très présent sur le marché de la e-santé a créé un comité d’éthique pour aider la banque à choisir ses investissements dans toutes les start-ups liés à la santé. Selon le Professeur Munnich, les entreprises françaises sont très présentes dans ce domaine.

Mais Thierry Zylberberg constate que si les entreprises françaises ont su développer des technologies de pointe dans la e-santé, le système médical français n’a pas le budget pour adopter ces technologies innovantes ou expérimenter les produits des start-ups. L’innovation est donc financée par des prêts français mais les entreprises exportent leurs innovations à l’étranger, principalement aux Etats-Unis.

4. STOCKAGE ET PARTAGE DE DONNÉES : DES QUESTIONS ÉTHIQUES ET SÉCURITAIRES

Selon Nicolas Moreau, Président-Directeur général d’AXA France, la France est l’un des pays où le partage de données est le plus encadré. Si pour Carlos Jaime, Directeur de la Division Santé et Equipement Médicaux de Samsung Electronic France, le risque zéro n’existe pas, les mesures de sécurité sont prises très au sérieux par tous les acteurs. Le Professeur Arnold Munnich et le Professeur Jacques Lucas, Vice-Président de l’Ordre des Médecins, rappellent néanmoins que de nombreux progrès ont été faits grâce aux partages de données sur les pathologies lourdes.

En conclusion, l’intervention de grands acteurs privés devrait permettre sur le long terme une diminution des coûts de la santé mais une vision politique est aujourd’hui nécessaire pour mettre en place ces transformations nécessaires à l’amélioration de la santé de chaque citoyen, indispensable pour assainir nos dépenses publiques.

Hommage à tous les médecins et personnels hospitaliers mobilisés pour soigner les victimes des attaques terroristes.

Merci,

Valérie Hoffenberg