Comment transformer les habitudes alimentaires?

4ème édition du Think Tank Food&Planet en partenariat avec :

Replay de la conférence

RETRANSCRIPTION DE L’ARTICLE

MIEUX EDUQUER POUR TRANSFORMER LES HABITUDES ALIMENTAIRES

Face au changement climatique, il est urgent de modifier nos modes de consommation. Pour sa 4ème session, le Think Tank Food & Planet, piloté par le Connecting Leaders Club et « Le Journal du Dimanche », se penchait le 31 mars sur la question « Comment transformer les habitudes alimentaires? », avec des spécialistes du secteur concerné.

Lutter contre le changement climatique, mieux rémunérer les agriculteurs, respecter le bien-être animal…Ces nouvelles attentes impliquent des changements importants dans nos modes de consommation et de production, de la fourche à la fourchette. Mais comment y parvenir ?

« La question est d’autant plus forte aujourd’hui avec le conflit en Ukraine qui bouleverse nos approvisionnements alimentaires », estime Stéphane Travert, ancien ministre de l’Agriculture et de l’Alimentation. Pour lui, « il va falloir produire davantage pour ne pas manquer de matières premières agricoles, mais produire mieux doit servir à consommer mieux et être en meilleure santé, tout en rémunérant mieux les agriculteurs ».

Les Français ont modifié leurs habitudes alimentaires ces dernières années. « On observe de plus en plus de consommateurs, depuis trois ans, tournés vers leur santé avant tout, adeptes du bio au quotidien ou du fait-maison, car ils savent ce qu’il y a dedans ; ça les rassure », estime Marie Sarazin, diététicienne, nutritionniste et chef d’équipe chez Make Me Healthy.

« Il y a un engouement pour les sujets de durabilité et de santé du côté tant des entreprises que des consommateurs ; le Nutri-Score encourage à manger plus sain », confirme Grégory Dubourg, DG du cabinet de conseil en stratégies nutrition Nutrikéo, qui observe que, « pour des questions environnementales et éthiques, les Français mangent progressivement moins de viande ».

"On doit apprendre à bien manger comme on apprend les maths à l’école"

Grégory Dubourg, DG du cabinet de conseil en stratégies nutrition Nutrikéo

Tous les consommateurs ont envie d’améliorer leurs habitudes alimentaires, mais cela est parfois difficile à mettre en oeuvre. « Les habitudes sont souvent ancrées dans les cultures et les pratiques familiales », souligne Grégory Dubourg.

Pour faciliter les changements, cela doit passer par une meilleure pédagogie de l’alimentation durant la scolarité. « On doit apprendre à bien manger comme on apprend les maths à l’école », insiste-t‑il. L’État joue également un rôle majeur avec le Programme national nutrition santé (PNNS), créé en 2001, qui a pour objectif l’amélioration de l’état de santé de l’ensemble de la population en agissant sur la nutrition, rappelle de son côté Stéphane Travert.

Des messages comme « mangez cinq fruits et légumes par jour » ont été diffusés avec succès grâce au soutien public. « Mais la mise en application n’est pas toujours au rendez-vous ; il faut que ce soit plus interactif et inclusif et que tout le monde soit actif sur tous les maillons de la chaîne », insiste Grégory Dubourg, qui regrette que « l’éducation à l’alimentation manque dès le plus jeune âge et [que] les médecins soient peu formés à la nutrition ».

L’entreprise Make Me Healthy préconise de son côté un changement des habitudes de consommation sur du long terme, avec un équilibre personnalisé selon le patient et sans supprimer des catégories d’aliments. « Notre philosophie, qui s’articule autour des produits bruts et de saison, idéalement issus de l’agriculture biologique et locale, est d’accompagner nos patients pour les rendre autonomes et sereins face à leurs choix alimentaires, souligne Marie Sarazin, diététicienne et responsable d’équipe chez Make Me Healthy, qui encourage ses patients à s’ouvrir l’esprit avec de nouveaux aliments comme les alternatives végétales (protéines végétales et alternatives aux produits laitiers). Nous sommes là pour les épauler pas à pas, leur proposer une alimentation adaptée à leurs besoins, pour un changement durable et bénéfique pour leur santé. » Pour elle, « plus les consommateurs testeront de nouveaux produits, moins il y aura de lassitude ».

Les différents labels de qualité existant sur le marché français, comme le bio, le Label rouge et les AOP/AOC, sont également à privilégier si l’on veut changer de modèle alimentaire. « Ils permettent à la fois de manger mieux et d’apporter une meilleure rémunération aux agriculteurs », rappelle l’ancien ministre de l’Agriculture et de l’Alimentation Stéphane Travert.

Changer ses habitudes de consommation passe également, selon Grégory Dubourg, par « une reconnexion de tous les acteurs de la filière, agriculteurs, industriels et consommateurs, pour mieux expliquer et comprendre ce qu’est un aliment, comment il est fabriqué, et améliorer la transparence des industriels vis‑à-vis des consommateurs ». Les nouvelles technologies comme la blockchain et des applications comme Yuka aident aussi à répondre aux questions des consommateurs.

Spécialisé dans les produits laitiers avec des marques comme St Môret, Tartare et Caprice des dieux, le groupe Savencia a mis en place plusieurs initiatives depuis 2019 pour répondre à ces enjeux. Au sein de leur plan RSE baptisé Oxygen, un volet est dédié à « Offrir un plaisir sain et responsable » avec notamment une offre de produits naturels et peu transformés et l’utilisation de la méthodologie Nudge pour faciliter les changements de comportements.

Avec la démarche #PositiveFood, le groupe défend une vision positive de l’alimentation. « Nous avons la conviction qu’il est possible d’adopter une alimentation saine et durable sans renoncer au plaisir de manger », rappelle Nikta Vaghefi, directrice nutrition de Savencia.

Pour elle, il est important de rendre désirable l’alimentation saine et durable pour faciliter les changements de comportement, un principe également souligné par l’Organisation mondiale de la santé. La diversité alimentaire est clé en donnant une place privilégiée aux produits peu transformés, avec plus de produits d’origine végétale, mais aussi d’origine animale afin de préserver l’équilibre alimentaire.

Le groupe mène, en parallèle, des actions sur les recettes comme la réduction du sel, des propositions de recettes gourmandes et équilibrées associant fromages et légumes… et l’ajout des repères de portions sur les produits.

La question du prix joue un rôle prépondérant dans l’alimentation. Cela peut parfois constituer un frein pour changer ses habitudes. Mais mieux manger coûte-t‑il plus cher ? « C’est vrai que manger bio coûte plus cher, mais on peut manger sain et durable à des prix raisonnables si on sait choisir les bons aliments et les cuisiner, répond Grégory Dubourg. C’est un choix sociétal et individuel. »

D’où la nécessité d’éduquer à l’alimentation dès le plus jeune âge.

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